mercredi 3 octobre 2012

Des sciences cognitives à la salle de classe

Le hasard faisant souvent bien les choses, je viens de me replonger dans le livre "Apprendre à lire: Des sciences cognitives à la salle de classe" écrit sous la direction de Stanislas Dehaene.


Et je me suis souvenue pourquoi je l'avais tant apprécié: il est clair et précis. Les explications sont scientifiques sans prendre la tête. Bref, on comprend réellement mieux le mécanisme cérébral d'apprentissage de la lecture. Et surtout, cet ouvrage offre des pistes de mise en application des recherches. 

Je voulais revenir sur les deux premiers principes dégagés par les auteurs dans la mesure où ils rejoignent les observations faites voici déjà plus d'un siècle par le dr Montessori:

¤ L'enseignement explicite du code alphabétique 

Pour l'enfant qui ne sait pas lire, certaines règles de bases doivent être explicitement enseignées. En effet, il est important de comprendre (et d'apprendre) dès le départ que les sons émis (phonèmes) trouvent à s'écrire par des lettres (un graphème ou une combinaison de graphèmes) dans un ordre donné et irréversible (de gauche à droite). On commencera donc par enseigner la correspondance entre les phonèmes et les graphèmes (d'abord simples, puis combinés) et la mobilité de ces derniers permettant une multitude de sons. 

C'est ici que l'alphabet mobile tel que l'avait conçu Maria Montessori prend tout son intérêt.
Qu'il soit tridimensionnel et donc sensoriel (pour les plus jeunes) ou tactile par le biais d'une tablette numérique, cet alphabet ouvre la voie à des possibles pour l'enfant qui ne maîtrise pas encore le graphisme. Une difficulté à la fois, svp!

On s'attarde également à la question de la discrimination en miroir (ou pourquoi les enfants confondent souvent, longtemps, "b" "d" "p" et "q") et l'aide que peuvent apporter les lettres rugueuses de Maria Montessori. Là, le sensoriel est primordial: l'enfant trace et "sent" le sens de formation de la lettre, "imprimant" par divers canaux sensoriels les distinctions.

¤ La progression rationnelle de l'apprentissage

Lorsque l'on est familier de la langue française, on sait que certains graphèmes sont plus réguliers ou fréquents que d'autres. Il semble donc raisonnable et logique de commencer par les correspondances graphèmes-phonèmes les plus régulières (la lettre se prononce toujours de la même manière: exemple "f", "l") et les graphèmes les plus fréquents (qui permettent de lire le plus grand nombre de mots) plutôt que par un enseignement dans l'ordre alphabétique. C'est à ce stade que l'on introduit les combinaisons syllabiques progressivement ainsi que la notion de lettre muette. On commencera aussi très tôt à décomposer les mots en morphèmes (les plus petites unités de sens que contiennent un mot) afin de conscientiser le sens mais aussi de débuter un ancrage orthographique.

Dans ce cadre, les "boîtes de lectures" d'inspiration montessorienne, et les dictées muettes  (on propose à l'enfant une/des image(s) et il écrit - souvent à l'aide de l'alphabet mobile - les mots correspondants) prennent toute son importance. Elles sont évolutives et tiennent donc compte de ces régularités, fréquences et de leur progression.

Les autres principes repris dans "Apprendre à lire" sont tout aussi pertinents. Je propose d'y revenir plus en détail dans de prochains messages afin d'y associer d'autres aspects des méthodes Montessori ou Alphas.